Gloire des lettres françaises dans les années 60 et 70, Christine de Rivoyre a élaboré patiemment une oeuvre sensible, drôle et révoltée.

Romancière et journaliste française, Christine de Rivoyre a reçu le Prix Interrallié pour Le Petit matin (1968), roman qui passe dans les Landes pendant la Seconde Guerre mondiale et raconte l’histoire d’amour d’une adolescente, Nina, pour un officier allemand. Auteure de treize romans, Christine de Rivoyre a connu pendant quarante ans un succès jamais démenti, tant de la part de la critique que du public. Ses thèmes favoris, l’amour, l’adolescence, les chevaux, la critique de la société de consommation, sont portés par un style dont la sensualité et l’humour la rapprochent de Colette.

Née à Tarbes, où son père, officier au Cadre Noir, était en garnison, elle grandit dans les Landes, à Onesse-et-Laharie où sa famille maternelle possède un vaste domaine. Après des études au Sacré-Coeur de Bordeaux puis de Poitiers, dont elle gardera toujours un excellent souvenir, elle part à Paris pour étudier la littérature anglaise et la civilisation américaine. Après une licence, elle obtient une bourse pour aller étudier le journalisme à l'université de Syracuse (état de New York). Elle y fait notamment la connaissance de Joan Phelan Tuttle (surnommée "Turtle") avec elle noue une amitié durable. Ce séjour américain lui inspirera plusieurs romans La Folie en tête (1960),La Glace à l'ananas (1962) et Le Voyage à l'envers (1977).

 

De retour à Paris, elle est quelque temps attachée de presse des ballets des Champs-Elysées. Elle avait connu Roland Petit et les danseurs du ballet avant-guerre grâce à sa cousine Nathalie Philippart qui fut un temps l'épouse de Jean Babilée. Cette expérience lui fournira la matière de son premier roman, L'Alouette au miroir (1955). C'est à cette époque qu'elle rencontre le journaliste Olivier Merlin, responsable des pages sportives et des critiques de spectacles au Monde. Celui-ci lui propose de rejoindre le quotidien d'Hubert Beuve-Méry. Un temps courriériste, Christine de Rivoyre est ensuite chargée des interviews avec les auteurs et les artistes, notamment Anglais et Américains. C'est ainsi qu'elle rencontre, entre autres, William Faulkner, Charlie Chaplin, Spencer Tracy, etc.

 

En 1954, des problèmes de santé l'obligent a abandonné sa collaboration au quotidien. Elle en nourrira toujours de profonds regrets. Elle commence alors la rédaction d'un premier roman, L'Alouette au miroir. Grâce à l'entremise de Michel Déon dont elle vient de faire la connaissance et qui lui présente Félicien Marceau, le roman est publié chez Plon en 1955 et obtient le Pirx des Quatre-jurys et le Prix Louis Barthou de l'Académie française.

 

Alors que débute sa carrière de romancière, Christine de Rivoyre est engagée par Marie-Claire pour prendre la direction littéraire du magazine. Malgré des relations difficiles avec la direction, Jean Prouvost et Hervé Mille, elle réussit à faire publier des textes importants d'auteurs contemporains dont certains deviendront des amis, tels François Nourissier et Félicien Marceau.

 

En 1957, La Mandarine connaît un succès critique et publique. La première phrase "L'amour me donne faim" marque une époque et annonce les revendications qui se feront jour pendant la décennie suivante. Le roman sera adapté par Edouard Molinaro en 1971 avec Annie Girardot dans le rôle de l'héroïne principale, Séverine. Suivent La Folie en tête (1960) et La Glace à l'ananas (1962).

 

Des problèmes internes à sa maison conduisent l'écrivaine à reprendre son indépendance. François Nourissier lui propose alors de rejoindre Grasset, qui, notammant grâce à Christiane Rochefort et Françoise Mallet-Joris, connaît un renouveau. Elle y publie en 1964, Les Sultans. Un nouveau succès. Deux ans plus tard, Jean Delannoy en tirera un film avec Gina Lollobridgida dans le rôle principal. La première scène du roman qui se déroule dans les embouteillages parisiens n'est pas sans évoquée les recherches du Nouveau Roman.

 

En 1966, Christine de Rivoyre met fin à sa collaboration à Marie-Claire et décide de se consacrer à l'écriture. Elle ne reviendra au journalisme qu'épisodiquement, notamment pour l'Express, à la demande de son amie Madeleine Chapsal. Lors de ses quelques mois de collaboration au journal, elle a un différend sérieux avec François Mauriac qui juge les contributions de Christine de Rivoyre trop féminines et trop anti-religieuses et qui l'appelle irrévérencieusement une de ces dames de l'Express[1][2].

 

Cette même année, elle fait la connaissance à Tunis lors de la remise du Prix des Quatres-Jurys à Albertine Sarrazin, d'Alexandre Kalda, romancier précoce (son premier roman fut publié alors qu'il n'avait que 16 ans), homosexuel, avec lequel elle entretiendra une relation longue, forte et douloureuse. C'est une période d'intense création pour la romancière dont l'oeuvre prend un nouveau tournant avec la parution en 1968 de son roman Le Petit Matin, couronné par le Prix Interallié. L'écrivaine y retrouve les Landes et sa famille, dominée par la figure de son père cavalier. L'action se déroule pendant l'Occupation et raconte l'histoire d'amour entre la jeune Nina et un cavalier allemand. Les chevaux et les paysages des Landes sont au coeur du livre. De nombreux critiques ont comparé l'écrivaine à Colette pour son évocation de la nature et des relations entre les deux personnages et les chevaux. Le roman sera adapté par Jean-Gabrielle Albiccoco avec Mathieu Carrière dans le rôle de l'officier Allemand et Catherine Jourdan dans le rôle de Nina.

 

A partir du Petit Matin, beaucoup de romans de Christine de Rivoyre ont pour cadre les Landes.

 

Étrangère aux événements comme aux revendications de mai 68, la romancière en fait néanmoins la toile de fonds de Fleur d'agonie (1970), dénonciation grinçante du tourisme moderne. En 1971, à la demande de Félicien Marceau, son grand ami, Christine de Rivoyre intègre le jury du Prix Médicis. Elle en est toujours membre.

 

En 1973, c'est un nouveau retour aux Landes et à son enfance avec Boy. Christine de Rivoyre y met en scène la bourgeoisie bordelaise et raconte le destin tragique d'un jeune homme, Boy, à l'approche de la Seconde Guerre mondiale, symbole de la fin d'un monde. Le roman frappe les lecteurs par sa construction. Le récit fait en effet alterner les paroles d'Hildegarde, une jeune fille, et de Suzon, une domestique, toutes deux amoureuses de Boy. On voit également apparaître dans le roman le personnage de Maria Sentucq, transposition romanesque de Marie Lacoste, la domestique de la grand-mère et de la mère de Christine de Rivoyre, personnage central dans la vie de l'auteure.

 

Dans Le Voyage à l'envers (1977), la romancière entre dans la peau d'un homme, Foulques, qui à l'occasion d'un voyage en Grèce fait un voyage à rebours sur son passé. L'occasion pour Christine de Rivoyre de retrouver "son" Amérique et d'évoquer Nantucket et Cape Cod où elle fut monitrice pendant ses études à l'université de Syracuse.

 

Au début des années 80, Christine de Rivoyre rachète la maison de sa mère à Onesse-et-Laharie où elle décide de s'installer. Ce retour permet à l'écrivaine de s'adonner librement à sa passion du cheval. Cette redécouverte lui inspire Belle alliance (1982). Reine-Mère publié en 1985 est un portrait sans concessions de la jeunesse tourmentée de la fin des années 70. On y a vu une explication anecdotique du départ dans les Landes de l'écrivaine pour fuir les violences parisiennes. Dans Crépuscule taille unique (1992), la mort du cheval et son enterrement au début du roman s'inspirent de la disparition d'un des chevaux préférés de l'auteure.

 

Racontez-moi les Flamboyant (1995) poursuit l'évocation de la bourgeoisie bordelaise commencée dans Boy, sur un mode plus autobiographique. Cette même année, Christine de Rivoyre apprend la mort accidentelle d'Alexandra Kalda en Inde. Cette nouvelle la terrasse. Elle avait fait de nombreux séjours dans l'ashram de Pondichéry où son ami s'était installé. Christine de Rivoyre cesse d'écrire.

 

Partageant son temps entre Paris et les Landes, elle se consacre à la défense du patrimoine des Landes (notamment le musée de Marquèze et l'oeuvre de Félix Arnaudin) et à la défense des animaux. Elle fait partie de nombreuses associations dont la Fondation Brigitte Bardot à qui elle voue une fervente admiration. L'écrivaine met fin à son silence en 2007 en publiant un livre-hommage à son ami disparu, Archaka, du nom qui lui avait été donné à l'ashram. Elle prépare actuellement un livre de souvenirs.

 

la bibliographie

Bibliographie

 aux éditions Plon

L’Alouette au miroir (1955) – Prix Louis Barthou de l’Académie française et Prix des Quatre-Jurys.

La Mandarine (1957)

La Folie en tête (1960)

La Glace à l’ananas (1962)

 

aux éditions Grasset

Les Sultans (1964)

Le Petit Matin (1968) – Prix Interallié.

Fleur d’agonie (1970)

Boy (1973)

Le Voyage à l’envers (1977)

Belle Alliance (1982)

Reine-Mère (1985)

Crépuscule taille unique  (1992)

Racontez-moi les flamboyants (1995)

Archaka (2007)

 

aux éditions Julliard

Le Seigneur des chevaux. En collaboration avec Alexandre Kalda (1969)

Filmographie

 Les Sultans (1966), réal. : Jean Delannoy,  scénario : Jean-Loup Dabadie, dialogues : Christine de Rivoyre ; avec Gina Lollobridgida (Liza Bortoli), Louis Jourdan (Laurent Messager), Renée Faure (Mme Messager), Corinne Marchand (Mireille), Philippe Noiret (Michou), Daniel Gélin (Léo), Rosy Varte (Delphine) etc.

La Mandarine (1971), réal. : Edouard Molinaro, scenario et dialogues : Edouard Molinaro et Christine de Rivoyre ; avec Annie Girardot (Séverine), Philippe Noiret (Georges), Madeleine Renaud (Mémé Boul), Murray Head (Tony), Marie-Hélène Breillat (Baba), Jean-Claude Dauphin (Alain), etc.

Le Petit matin (1971), réal. : Jean-Gabriel Albicocco, scénario : J.-G. Albicocco ; avec Catherine Jourdan (Nina), Mathieu Carrière (Karl), Madeleine Robinson (Eva), Jean Vilar (Paul), etc.